Sydney - Alors qu'elle habillait son grand-père bien-aimé pour ses obsèques, Pia Interlandi, une jeune styliste australienne, a trouvé sa vocation: dessiner des vêtements personnalisés pour les morts.
Jétais en train de lacer ses chaussures. Et puis je me suis dit +mais où va-t-il marcher?+. Il n'a pas besoin de chaussures", explique tranquillement la jeune femme de 26 ans, tout de noir vêtue.
Cette expérience l'a incitée à imaginer des vêtements "linceuls", en soie et en lin, qui enveloppent le corps et la tête des défunts afin, espère-t-elle, de leur offrir des habits agréables et personnalisés pour le dernier voyage.
Lorsque la styliste explique qu'elle dessine des vêtements pour les morts, les gens imaginent souvent qu'il s'agit de déguisements farfelus. "Ce n'est pas du tout ça. Je prends en considération les contraintes de vêtements destinés à être enterrés", confie-t-elle.
"Les contraintes concernant l'environnement sont fondamentales: il ne faut pas polluer la terre avec des plastiques. Il faut aussi être sûr que le tissu est beau et convient à la personne décédée".
Avant de se décider à étudier le stylisme, Pia Interlandi a brièvement travaillé dans l'ergothérapie, où elle a découvert différents types de matériaux de moulage, comme le plastique utilisé pour couvrir l'épiderme de personnes sévèrement brûlées. Elle s'est même fabriquée une robe avec cette matière.
Plus tard, étudiante en design à Melbourne, l'étudiante s'était montrée tout aussi originale, en faisant appel à des abats d'animaux pour ses travaux...
Un squelette vêtu de polyester "En fait, je suis allée chez le boucher. J'ai acheté un gros paquet d'abats, je les ai coupés et je les ai photographiés", se souvient-elle.
Son attrait pour la mort en tant que période de transformation, l'a incitée à travailler avec des fibres biodégradables, d'apparence solide mais qui se délitent sous l'effet de la décomposition des corps.
L'habitude en Australie d'enterrer les femmes en joli tailleur et les hommes dans leur plus beau costume, quelquefois avec des pantoufles, la mettait mal à l'aise.
"L'idée d'enterrer quelqu'un avec un vêtement en polyester qui va perdurer après sa décomposition me gênait. En fin de compte, vous finirez en squelette vêtu d'une drôle de tenue en polyester", affirme Pia Interlandi.
Elle a mené de longues recherches sur les tissus, allant jusqu'à enterrer une vingtaine de cadavres de cochons vêtus de ses créations, afin de tester la dégradation de matériaux. Puis sur une année, elle a progressivement déterré les porcs, observant la détérioration des tissus et de l'animal.
"En un an, mes vêtements avaient complètement disparu. Quand nous avons déterré le dernier cochon, il n'y avait plus que des fils, des os et des racines".
La créatrice souhaiterait exposer les restes de ces linceuls, mais connaît des difficultés à obtenir des autorisations, même s'ils seraient conservés dans des conteneurs réfrigérés pour éviter les odeurs.
"J'ai des difficultés parce que l'idée est un peu dégoûtante. Mais les habits en eux-mêmes sont plutôt beaux", affirme-t-elle.
Alors que de plus en plus, les cérémonies d'enterrements s'écartent du rite religieux traditionnel pour refléter devantage la personnalité du défunt, le projet de la jeune styliste pourrait rencontrer plus de succès.
Broder le poème ou la chanson préférés du défunt, son nom, ou dessiner son arbre généalogique sur son habit mortuaire sont quelques unes des idées de Pia Interlandi, qui espère lancer sa collection fin 2012.
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