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mardi 3 mai 2011

Mort de Ben Laden: Le coup de poker gagnant de Barack Obama


Son cabinet était divisé sur l'action. Mais après une vingtaine de meetings et avoir pesé le pour et le contre, le président américain a ordonné une attaque héliportée. Avec succès... 

Ce furent sans doute les 40 minutes les plus tendues de sa présidence. Mais à l'issue d'une opération éclair, la radio grésille: «Geronimo-E KIA», Geronimo –nom de code pour désigner Ben Laden– Enemy Killed in Action (ennemi tué en action).» Obama et ses conseillers, réunis dans la Situation Room de la Maison Blanche, peuvent respirer.

Le succès de la mission était pourtant loin d'être assuré. Après des années passées à identifier le fameux «coursier» de Ben Laden, puis des mois de contre-espionnage pour accumuler le maximum d'informations sur la résidence fortifiée d'Abbotabad, Obama a dû prendre la décision. Etre le «commander in chief». Sans avoir la certitude que l'ennemi public n°1 se trouvait bien sur place. Avec les risques d'un fiasco similaire à celui de l'intervention ratée lors de la crise des otages en Iran, en 1980.

«50 à 80%» de chances que Ben Laden soit sur place

Jeudi soir, lors d'un meeting, ses conseillers lui donnent un chiffre, raconte Time Magazine: les preuves indirectes de la présence de Ben Laden, selon le renseignement américain, se situent entre «50 et 80%». Leon Panetta, le directeur de la CIA, les joint-chiefs du ministère de la Défense, Joe Biden, Hillary Clinton et la dizaines de conseillers dans le secret, sont divisés sur la meilleure option.

Certains préconisent d'attendre, pour obtenir davantage d'informations. D'autres militent pour une frappe aérienne, moins risquée. Une petite moitié suggère l'attaque par un commando de Navy SEALS, qui s'entraînaient depuis des semaines sur une réplique grandeur nature de la résidence. Obama écoute tout le monde. Et reporte sa décision au lendemain.

Blagues au dîner et parcours de golf

La nuit lui porte conseil: il choisit la dernière option. Principalement car elle permet, si Ben Laden se trouve bien dans la résidence, de s'assurer de sa mort. Et surtout, de saisir sur place de potentiels documents et informations sur d'autres membres d'Al Qaida.

A cause du mauvais temps, l'opération est repoussée. Obama assiste du coup au dîner des correspondants de la Maison Blanche, samedi soir, enchaînant les blagues comme si de rien n'était. Lorsque le maître de cérémonie, Seth Myers, plaisante sur la cachette de Ben Laden, Obama rit, avec sa plus belle poker-face.

Dimanche, il joue au golf. Mais après le 9e trou, il s'interrompt brusquement et rejoint son équipe dans la Situation Room. L'heure a sonné.

«Les minutes semblaient durer des heures»

John Brennan, le monsieur contreterrorisme de la Maison Blanche, a raconté lundi ces 40 minutes historiques. Le président a pu suivre «en direct» l'opération, notamment avec un lien vidéo (Brennan n'a pas précisé s'il était en temps réel et en continu). «L'anxiété était palpable. Les minutes semblaient durer des heures», dit Brennan.

Certains font les 100 pas, Obama attend, tendu. Quand la nouvelle d'un problème mécanique sur un hélicoptère parvient, la tension monte d'un cran. Sur la photo publiée par la Maison Blanche (ci-dessus), on voit Hillary Clinton, la main sur la bouche, visiblement anxieuse.

Pièce après pièce, les membres de la Team Six progressent dans la résidence. Jusqu'au dernier étage, où, selon les témoignages, Ben Laden aurait tenté d'utilisé une de ses femmes comme bouclier humain. Une balle dans la tête et une dans la poitrine écrivent l'épilogue.

Nouvelle stature pour Obama

Sur CNN, le politologue David Bergen estime que ce succès donne une nouvelle stature à Obama, à son administration et au renseignement américain. Après 10 ans de traque, le «grand Satan» n'est plus. Pendant des mois, la Maison Blanche a préparé l'opération sans aucun fuite –un exploit à l'époque de Twitter. A ceux qui l'accusaient de ne pas être assez dur en politique extérieure, Obama a répondu en lançant une opération «capture or kill.» Avec les résultats au bout.

Il est cependant trop tôt pour y voir l'assurance de sa réélection. En 1991, George Bush père, fort de la victoire éclair contre Saddam Hussein au Koweït, voyait sa côte de popularité monter à 90%. Deux ans et une crise économique plus tard, il s'inclinait face à Bill Clinton. Mais au moins pour un jour, l'Amérique savoure. Même l'ancien maire républicain de New York, Rudy Giuliani a félicité Obama: «Job well done, sir.»
— Philippe Berry

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