La jeune soeur de Yassine Bouzidi, tué lors de l'attentat de Marrakech le 28 avril 2011, regarde des photos avec son ami Moustapha. —Faustine Vincent / 20 MINUTES
La famille de Yassine Bouzidi, serveur dans le café visé, a reçu «20Minutes» (Site officiel français) chez elle. Elle se dit «soulagée» par la mort de Ben Laden...
Une immense tente a été dressée dans la rue pour l’occasion, aux frais du roi Mohammed VI. La veille, 300 personnes sont venues dans ce quartier populaire de Marrakech pour les obsèques de Yassine Bouzidi, un serveur marocain du café Argana tué dans l’attentat. Quelques enfants jouent entre les chaises vides, pendant que les parents et les amis se retrouvent autour d’un thé dans la maison. Moustapha, l’un des frères aînés de la victime, raconte ce qu’ils ont traversé. La douleur quand ils ont appris qu’une explosion avait ravagé le café où travaillait Yassine. L’angoisse de l’attente face aux informations contradictoires. Les cris, ensuite, quand la nouvelle tombe, définitive. «On l’a su à 20h. On m’a dit "cette fois c’est sûr, il est mort". Je ne savais plus où j’étais», raconte ce Franco-marocain de Bordeaux...
A la différence des familles françaises touchées par le drame, pour qui la pression médiatique était une violence supplémentaire et qui n’ont pas souhaité s’exprimer, Moustapha souhaite parler au plus grand nombre possible. «Parce que cet attentat nous concerne tous, toutes nationalités confondues. Je veux dénoncer ce drame. Comme ça, peut-être que les terroristes se rendront compte de ce qu’ils ont fait.» Il attend aussi du gouvernement qu’il «fasse un geste» pour que la femme et la petite fille de Yassine, désormais sans revenus, puissent continuer à vivre. «C’est Yassine qui ramenait l’argent à la maison, avec son salaire et ses pourboires. Comment elle va faire, maintenant? Elle est enceinte, ne travaille pas, et n’a pas de diplôme.» Le téléphone sonne. Les enfants courent d’une pièce à l’autre. «C’était un cousin de Nantes, explique Moustapha. Il voulait nous exprimer ses condoléances.»
Une immense tente a été dressée dans la rue pour l’occasion, aux frais du roi Mohammed VI. La veille, 300 personnes sont venues dans ce quartier populaire de Marrakech pour les obsèques de Yassine Bouzidi, un serveur marocain du café Argana tué dans l’attentat. Quelques enfants jouent entre les chaises vides, pendant que les parents et les amis se retrouvent autour d’un thé dans la maison. Moustapha, l’un des frères aînés de la victime, raconte ce qu’ils ont traversé. La douleur quand ils ont appris qu’une explosion avait ravagé le café où travaillait Yassine. L’angoisse de l’attente face aux informations contradictoires. Les cris, ensuite, quand la nouvelle tombe, définitive. «On l’a su à 20h. On m’a dit "cette fois c’est sûr, il est mort". Je ne savais plus où j’étais», raconte ce Franco-marocain de Bordeaux...
A la différence des familles françaises touchées par le drame, pour qui la pression médiatique était une violence supplémentaire et qui n’ont pas souhaité s’exprimer, Moustapha souhaite parler au plus grand nombre possible. «Parce que cet attentat nous concerne tous, toutes nationalités confondues. Je veux dénoncer ce drame. Comme ça, peut-être que les terroristes se rendront compte de ce qu’ils ont fait.» Il attend aussi du gouvernement qu’il «fasse un geste» pour que la femme et la petite fille de Yassine, désormais sans revenus, puissent continuer à vivre. «C’est Yassine qui ramenait l’argent à la maison, avec son salaire et ses pourboires. Comment elle va faire, maintenant? Elle est enceinte, ne travaille pas, et n’a pas de diplôme.» Le téléphone sonne. Les enfants courent d’une pièce à l’autre. «C’était un cousin de Nantes, explique Moustapha. Il voulait nous exprimer ses condoléances.»
«Tu verras, un jour je serai célèbre»
L’agitation des jours précédents se termine. Les souvenirs ne resurgissent que maintenant. «Je me rappelle que quand il avait 6 ou 7 ans, mon frère allait frapper à toutes les portes du quartier. Il demandait comment ça allait, un verre de thé ou un morceau de pain. C’était quelqu’un de très gentil.» Surpris par l’affluence de ceux, anciens amis ou clients de Yassine, qui sont venus les soutenir aux obsèques, Moustapha avoue «découvrir à quel point [son frère] était aimé par tout le monde. Lui qui paraissait souvent être dans son coin, tranquille, discret». Yassine avait 32 ans et avait rêvé de devenir chanteur. «Quand il était petit, il m’avait dit : "Tu verras, un jour je serai célèbre." Quand l’attentat est arrivé, j’ai repensé à ça. Il est célèbre, aujourd’hui», soupire Moustapha.
Quelques photos circulent. La famille vérifie que l’épouse de Yassine n’est pas là pour les voir: «Elle ne peut plus les regarder, ça la fait trop souffrir», glisse son frère. Nawal, la petite soeur, s’effondre subitement. Le père, en costume rayé et babouches blanches, reste près d’eux. «On ne peut rien faire. C’est Dieu qui décide», dit-il paisiblement. Il se dit «très touché» par la lettre que leur a envoyée le roi ce jour-là pour transmettre ses condoléances. Un courrier signé de sa propre main, que la famille garde comme une relique sacrée. «C’est pas n’importe qui qui reçoit une lettre du roi», confie-t-il. «Il nous a aidés pour toutes les dépenses liées à la catastrophe», précise Moustapha.
L’agitation des jours précédents se termine. Les souvenirs ne resurgissent que maintenant. «Je me rappelle que quand il avait 6 ou 7 ans, mon frère allait frapper à toutes les portes du quartier. Il demandait comment ça allait, un verre de thé ou un morceau de pain. C’était quelqu’un de très gentil.» Surpris par l’affluence de ceux, anciens amis ou clients de Yassine, qui sont venus les soutenir aux obsèques, Moustapha avoue «découvrir à quel point [son frère] était aimé par tout le monde. Lui qui paraissait souvent être dans son coin, tranquille, discret». Yassine avait 32 ans et avait rêvé de devenir chanteur. «Quand il était petit, il m’avait dit : "Tu verras, un jour je serai célèbre." Quand l’attentat est arrivé, j’ai repensé à ça. Il est célèbre, aujourd’hui», soupire Moustapha.
Quelques photos circulent. La famille vérifie que l’épouse de Yassine n’est pas là pour les voir: «Elle ne peut plus les regarder, ça la fait trop souffrir», glisse son frère. Nawal, la petite soeur, s’effondre subitement. Le père, en costume rayé et babouches blanches, reste près d’eux. «On ne peut rien faire. C’est Dieu qui décide», dit-il paisiblement. Il se dit «très touché» par la lettre que leur a envoyée le roi ce jour-là pour transmettre ses condoléances. Un courrier signé de sa propre main, que la famille garde comme une relique sacrée. «C’est pas n’importe qui qui reçoit une lettre du roi», confie-t-il. «Il nous a aidés pour toutes les dépenses liées à la catastrophe», précise Moustapha.
«C’est le destin de Dieu. Il fera justice»
L’épouse de Yassine, vêtue d’une longue robe blanche en signe de deuil, se tient immobile sur le canapé. «C’est le destin de Dieu. Il fera justice», murmure-t-elle. Le corps de son mari a été enterré juste à côté d’un vieil homme auquel il aimait rendre visite quand il était enfant, et qui venait de mourir quelques jours plus tôt. «Je ne crois pas que ce soit une coïncidence. Il y a des choses qui nous dépassent», glisse Moustapha.
La nuit tombe. Avant de partir, Nawal rappelle le plus important à ses yeux: Que l’on parle de son frère, pour qu’il ne tombe pas dans l’oubli. Pour la jeune femme, la mort de Ben Laden a été un «soulagement». «S’il est bien le responsable de la mort de mon frère, Allah a rendu justice», confie-t-elle. Avec l’espoir, désormais, de «pouvoir recommencer à vivre normalement».
— Faustine Vincent
L’épouse de Yassine, vêtue d’une longue robe blanche en signe de deuil, se tient immobile sur le canapé. «C’est le destin de Dieu. Il fera justice», murmure-t-elle. Le corps de son mari a été enterré juste à côté d’un vieil homme auquel il aimait rendre visite quand il était enfant, et qui venait de mourir quelques jours plus tôt. «Je ne crois pas que ce soit une coïncidence. Il y a des choses qui nous dépassent», glisse Moustapha.
La nuit tombe. Avant de partir, Nawal rappelle le plus important à ses yeux: Que l’on parle de son frère, pour qu’il ne tombe pas dans l’oubli. Pour la jeune femme, la mort de Ben Laden a été un «soulagement». «S’il est bien le responsable de la mort de mon frère, Allah a rendu justice», confie-t-elle. Avec l’espoir, désormais, de «pouvoir recommencer à vivre normalement».
— Faustine Vincent
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